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Analog / Reflective Portraits

Reflective portraits #2 : De l’ autre côté du miroir…

L‘évolution photographique qui découle du passage de l’argentique au numérique, peut ne pas être exclusivement perçue comme une continuité évidente. Tantôt l’un ne peut aller sans l’autre, ne pourrait exister sans le premier. Tantôt au contraire, un fossé les sépare et les fait s’opposer comme deux aimants que l’on retourne. Cela serait se fourvoyer que de ne pas reconnaître et admettre à quel point la photographie numérique tente à nous enrôler dans la facilité. Je ne parle décemment pas pour les professionnels et autres virtuoses qui maîtrisent leur boîtiers les yeux fermés et composent avant tout, avant de déclencher. Seulement, bien (trop) souvent, le numérique nous emmène sur la pente glissante du vif, de l’instantané à saisir. On déclenche à tout va. Et c’est précisément là, que le bât blesse.

Reflective portrait in a mirror

S‘il y a quelques années, je ne pouvais concevoir de partir en road trip sans mon numérique, je me rends compte que le dernier voyage en Suède à surement et radicalement changé la donne. Plus les années passent, plus les voyages s’enchaînent et plus j’en viendrais presque à ne jurer que par l’argentique. J’ai pris un tel plaisir en Suède en juin dernier avec mon boitier argentique. Je m’étais limitée à un seul, mon cher Canon AE-1, laissant à la maison le Welta, pour cause de poids à porter (!), et je me suis assez vite rendue compte que c’était bien souvent lui que je dégainée en premier. Je ne vais pas vous refaire le discours, vous connaissez déjà les notes, l’argentique ne peut à mon sens être mis sur la même table que le numérique. L’approche en est tellement lointaine et différente. J’aime par-dessus tout, le fait de revenir aux fondamentaux avec l’argentique. Sentir l’excitation de l’instant qu’on a sous les yeux et que l’on souhaite à tout prix immortaliser sur le film, la pointe de stress en faisant les réglages, en optimisant au mieux son ouverture et sa vitesse. Clac. C’est dans le boitier. On a souvent un léger sourire au coin des lèvres, tantôt impatient de voir le résultat, tantôt dubitatif en se demandant si on à bien fait de prendre telle ouverture. Ne va t-elle pas être trop sous exposé ? Le contre jour ne va t-il pas être traître ? Et ce flare qui rendait si bien dans le viseur, le sera t-il aussi sur le film ?

Poland reflective portraitPoland reflective portrait

Je me souviens être entrée au reflective portraits à l’argentique par le biais de ma première venue en Pologne. Le programme était chargé, nous bougions pas mal à travers le pays. Avec le recul, je me rends compte du nombre de reflective portraits à côté desquels je suis passée ! L’évidence ne me sautait pas encore au visage. J’étais bien plus intriguée par ces reflets qu’autre chose, la possibilité infime qu’ils me renvoyaient, l’immensité du champ d’action qu’ils m’offraient et au travers du quel je me sentais me noyer, comme en atteste les deux photographies ci-dessus.

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Comme vous l’avez vu et lu au précédent article, si je n’ai aucuns regrets à avoir concernant mes débuts au numérique avec cette série de Reflective Portraits; quand bien même la « qualité technique » n’y est pas, l’histoire et le ressenti y sont, et c’est le plus important. Les années ont filé, la série à quelque peu évolué à mon insu, comme vous avez pu le voir, avec l’apport presque involontaire de « sous catégories » à ce projet. Le plus naturellement du monde, mes Reflectives Portraits se sont vus scinder. Mon cercle restreint s’est ouvert à autrui, pour d’une part mieux l’observer, afin d’autre part au fil du temps, l’intégrer. Peu à peu, je me suis rendue compte à quel point j’aimais particulièrement intégrer autrui à l’étranger, lors de mes voyages. De Paris à New-York, Bydgoszcz à Stockholm et j’en passe, c’est devenu un incontournable. Les situations peuvent être cocasses, imprévisibles, et le rendu vraiment top, comme on peut l’observer sur la photographie ci-dessus, dans le métro de Copenhague, le soir de notre arrivée en terre danoise.

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Le défi en vient à être de taille. Le rapport en est tout autre. Il n’y a plus de « je » mais bel et bien un jeu avec « on ». Parfois la prise passe dans la plus grande indifférence, alors qu’elle ne semble pas l’être sur le rendu. Les gens sont bien souvent surpris après coup, d’être dans mon Reflective Portrait. Soit parce qu’ils ne m’ont tout bonnement pas vu déclencher, soit parce qu’ils n’avaient pas la moindre idée du cadrage, et pensaient naïvement du fait de ma position, en être à des années lumières. J’en veux pour preuve les deux photos qui suivent.

Reflective portrait in SwedenNew-York, reflective Portrait

La première date de juin dernier, lors de ce fameux road trip en Suède dont vous entendrez parler à la rentrée (un peu de patience!). Je crois que M. est de loin une source intarissable d’inspiration pour moi. Elle a une expression dans le regard, dans ses jolis yeux bleus afghans<3 J’ai d’ailleurs réalisé grâce à elle, à Stockholm, l’un de mes plus joli portrait jusqu’ici. Un mélange de portrait et de reflet. Mais je vous garde cela au chaud pour un peu plus tard :)
La seconde photographie remonte à 2012, lors de cette incroyable semaine à New-York. Nous allions assister en ce dimanche matin grisâtre à une messe Gospel incroyable, souvenez-vous. Nous étions en avance et et avions pris le temps de s’y rendre tranquillement tout en arpentant les quelques rues/avenues qui nous séparaient du lieu de célébration. Je me souviens m’être littéralement arrêtée nette, lorsque nous sommes passés devant cette devanture de bureau commerciale, et que j’ai vu cette scène. Le temps d’hésiter un quart de seconde à la composition de ma photographie et voilà que je déclenchais. Hésiter, car lorsque j’ai vu ces deux jeunes garçons adossés à cette voiture, attendant je ne sais quoi, il m’apparaissait évident que je voulais immortaliser la scène et qui plus est à travers le reflet de cette vitre de bureau. Seulement, on sortant mon appareil et pointant en direction du sujet, avant de cadrer comme il le fallait, juste en l’amenant à mon oeil, je me suis vue dans ce reflet avec eux. Le rendu en était tout autre, et montre à quel point l’impact d’une image peut se jouer à trois fois rien, un décalage sur la droite, l’insertion du narrateur omniscient et le contenu change. Mais surtout, le rendu, l’Histoire de cette image. C’est là tout ce que j’aime. Le plus drôle, fut de voir, qu’une fois après avoir déclenché, rien n’avait bougé. J’ai baissé mon appareil et ils n’avaient rien remarqué. Ce n’est que lorsque je me suis retournée face à eux, qu’ils ont eu un regard dubitatif en voyant l’antiquité que je tenais dans mes mains. Seulement à aucun moment, ils n’ont soupçonné qu’ils se trouvaient désormais à jamais, prisonnier de ma pellicule.

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Au fur et à mesure que l’histoire de cette série Reflective Portraits s’est écrite, notamment avec l’introduction d’autrui dans mon champ de vision/reflet, une nouvelle dimension est entrée en jeu. A savoir, celle d’être à la foi un reflective portrait, mais également et surtout LE dernier d’un moment T. La perception et l’aura qu’ils peuvent revêtir dans ces cas là en est plus que décuplé. Le souvenir en devient poignant pour certaines. Les deux qui suivent ci-dessus en sont l’exemple même. La première fut prise à l’aéroport de Stockholm, en juin dernier. C’est là, ma dernière photographie de ce road trip de 3 semaines. Une dernière image à immortaliser avant d’embarquer pour Paris et une symbolique forte, que de faire un reflective portraits avec M. & C., comme un goût savoureux de boucler la boucle ici même, à l’aéroport, trois semaines jour pour jour après avoir entamée cette incroyable boucle, à l’aéroport de Paris.
Quant à la seconde, je ne rentrerais pas dans les détails ici, puisque j’y reviendrai dans un article très prochainement; mais elle est l’exemple même du souvenir poignant qui découle de l’histoire qu’elle projette et raconte. Une personne clef, un endroit clef identifiable par une phrase clef de premier plan. Le souvenir à jamais immortalisé de ce dernier moment avant le départ. Le dernier qu’il devrait me rester, s’il ne devait y en avoir d’autre. La solennité du « dernier » emplit de fierté de L’avoir immortalisé à jamais dans mon projet Reflective portrait, dans cet aéroport, qui au fond, décrit à merveille ce trait de caractère qui nous unit, cette mouvance inconstante; au travers de cet appareil photo qui me permet de réaliser cette série qui est mienne et qui n’est autre que le sien, qu’il m’a transmis, avec cette même passion, chevillé au corps.

Le jeu, l’amusement du départ vire alors à la nécessité, au besoin primordial. La recherche s’en trouve bousculée, l’effet chamboulé. l’Histoire prend définitivement le pas sur l’intention première. Les règles en sont comme inversées. Le contenu prime sur le contenant. Un détail qui sera mis en lumière dans le prochain article, ou je vous parlerai de deux autres « sous catégories » à ce projet de Reflective Portrait. A savoir l’introduction de la question de la surface réfléchissante, ainsi que du jeu avec le cadre. Comme en témoigne, l’avant gout ci-dessous… :)

Poland reflective portrait

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