Il y a des Ă©tapes d’un voyage que l’on imagine, que l’on se dessine dans sa tĂȘte avant d’y laisser ses traces de pas, d’y apposer ses yeux. Parfois, avec la prĂ©cision d’un crayon aiguisĂ©, parfois avec la confusion d’une aquarelle. Je me souvenais de ces histoires racontĂ©es Ă droite Ă gauche, des articles et vidĂ©os de Mathilde & Manu qui y avaient dĂ©jĂ Ă©tĂ©…Oui, avant mĂȘme de m’y rendre, je l’avais dĂ©jĂ en tĂȘte; la mythique Death Valley !
Death Valley !
Ce serait mentir que de vous omettre que c’Ă©tait bien l’Ă©tape de ce road trip Voyageurs du monde que j’attendais par dessus tout. Si je pensais naĂŻvement que SĂ©quoia me laisserait de marbre, j’Ă©tais persuadĂ©e que la Death Valley me comblerait. J’attendais tant de ce relief, de sa duretĂ© lunaire, de son Ă©touffement solaire, que l’Ă©merveillement visuel ne pouvait ĂȘtre qu’a son paroxysme. Qui aurait pu croire que je frissonnerais de froid et non de “peur”, dans la Death Valley ?! Surement pas nous !
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On the road !
A mesure que les miles s’enchaĂźnent sous la conduite de notre pilote en chef Manu, je me dĂ©lecte, curieuse, avec un sourire au coin des lĂšvres de voir notre copilote hors pair, Mathilde, me mimer et m’expliquer la topographie de la Death Valley, de ces deux “montagnes” Ă traverser avant que la planĂ©itĂ© de cette cuvette ne nous accueille. Nous ne sommes pas encore entrĂ©s dans le parc que dĂ©jĂ , le coup de coeur s’amorce au grĂ© du changement de dĂ©cor qui s’opĂšre, de plus en plus aride. Il ne fera que se confirmer au moment ou nous nous arrĂȘterons Ă cette station essence en bord de route, au milieu de nulle part, refaire le plein et prĂ©voir le ravitaillement en eau, soucieux de se fier aux recommandations de la Death Valley et de pouvoir en sortir, vivant ! Du moins, pas dĂ©shydratĂ© ! (Ca, c’Ă©tait sans compter sur la mĂ©tĂ©o qui ne nous ferait pas frissonner de peur ni de chaleur, mais bel et bien de fraĂźcheur. On en Ă©tait bien loin de la dĂ©shydratation, croyez moi ! C’Ă©tait drĂŽle, on en aura bien ri, et encore plus en voyant l’expression Ă©berluĂ©e et rieuse de la jeune fille Ă l’agence de loc de voiture, lorsqu’on lui a remis les clefs de la voiture et lui avons laissĂ© en cadeau deux bidons de 3L d’eau !!)
L’ascension en direction de la Death Valley s’amorce, cette premiĂšre cuvette aride Ă l’image de lac salĂ©e, aura le mĂ©rite de me faire Ă©carquiller les yeux comme il se doit pour la premiĂšre fois de la journĂ©e. La vision de l’horizon qui s’effrite au loin, qui s’Ă©vanouie avant mĂȘme que notre oeil ne s’y accroche, ces deux pans rocheux qui vous encadrent, comme pris au piĂšge, et puis cette route, droite, Ă perte de vue avant de deviner sa courbe sinueuse pour franchir le col et disparaĂźtre de l’autre cĂŽtĂ© du versant. Les heures filent, mais qu’importe, on en savoure chaque minute, on immortalise chaque recoin, car on sait d’avance qu’on ne reviendra pas sur nos pas demain.
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Welcome to Death Valley !
Le soleil se veut rasant en dĂ©passant le panneau officiel de la Death Valley. On en a dĂ©jĂ pris tant, plein les yeux, qu’on peine Ă rĂ©aliser que ça y est, on est enfin dans la Death Valley. Les premiĂšres courbes rocheuses se font de plus en plus pressantes, Ă la fois ondulantes et cassantes, abruptes, les couleurs chatoyantes du coucher de soleil se devinent timidement ce soir lĂ .
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Sand Dunes !
A peine les affaires dĂ©posĂ©es au Stovepipe Wells Village, qu’on file aussi tĂŽt profiter des derniĂšres lueurs du jour au sommet des crĂȘtes de Mesquite Flat Sand Dunes. Le dĂ©cor est plantĂ©, la surprise est de taille. Je ne m’attendais pas le moins du monde Ă trouver des dunes au coeur de la Death Valley. Un petit Ă©crin, vĂ©ritable oasis du dĂ©sert. On se laisse aller Ă glisser nos pieds dans le sable fin, Ă dĂ©valer les dunes en courant. Ce soir lĂ , on bouclera cette journĂ©e hautes en couleurs en nous rendant Ă notre premiĂšre “Star Party”, rien que ça (!), Ă 30 minutes de lĂ , Ă Furnace Creek. Je ne sais pas ce qui Ă©tait le plus dingue, de voir ce rassemblement de passionnĂ©s d’astronomie venu de Las Vegas avec un matĂ©riel de pointe pour certains ou il fallait grimper sur une Ă©chelle pour atteindre l’oeilleton de l’objectif et s’immerger en un coup d’oeil dans les Ă©toiles et la voie lactĂ©e; ou bien de distinguer au loin derriĂšre la vallĂ©e, malgrĂ© la nuit noire, la pollution lumineuse de Las Vegas(pourtant Ă plus de 200km de lĂ !).
Une anecdote qui me marqua, je revois encore ce halo bleu plus clair dans le ciel s’Ă©lever tout juste pour le distinguer au dessus du relief. Un souvenir visuel fort que je rattacherai indĂ©niablement avec les images au rĂ©veil le lendemain, de cette vue depuis le lit. La surprise de voir au loin sur les dunes, une tempĂȘte de sable s’affĂ©rer sous ce vent carabinĂ© qui s’est levĂ© pendant la nuit. La Death Valley se dĂ©couvre Ă nous sous une nouvelle facette.
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Mosaic Canyon !
A peine avons nous le temps de nous engouffrer dans l’Ă©troitesse des premiers tournants de Mosaic Canyon, que le soleil disparait pour de bon derriĂšre une importante masse nuageuse qui ne nous quittera plus. On se laisse porter par le vent qui nous enrĂŽle sur les hauteurs de certains pics du canyon, qui n’attendait que nous. Pas l’ombre d’une Ăąme courageuse en dehors des nĂŽtres pour s’aventurer Ă l’assaut de ce relief, avant de rebrousser chemin et de partir Ă la conquĂȘte des richesses de la Death Valley.
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Scotty’s Castle !
On jettera notre dĂ©volu sur Scotty’s Castle, parce qu’Ă la lecture du guide dans la voiture, on ne peut passer Ă cĂŽtĂ©. L’histoire est aussi surprenante que ne l’est le guide, qui, investi du personnage, vous conte celle-ci au fil des piĂšces de la demeure. Un moment aussi drĂŽle qu’inattendu que de se laisser porter par le talent d’orateur de ce guide sorti d’un film du dĂ©but du XXĂšme siĂšcle avec ses fines lunettes rondes, son chapeau, ses bretelles et sa cravate courte; qui nous colporte l’histoire de ce fin arnaqueur qui fit croire Ă la dĂ©couverte et prĂ©sence d’une mine d’or, en pleine Death Valley, et soutira une fortune Ă un milliardaire, qui pas rancunier, lui pardonna et devinrent meilleurs amis ! Rocambolesque, vous dis-je ! Le lieu en tant que tel est surprenant, on imagine difficilement un chĂąteau de la sorte au coeur de la Death Valley, et pourtant !
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Ubehebe crater & Titus Canyon !
En l’espace d’un instant, en arrivant Ă Ubehebe Crater, je me serais cru Ă la RĂ©union, comme une impression de dĂ©jĂ vue et de jolis souvenirs qui ressurgissent, face Ă cet ancien cratĂšre. La mĂ©tĂ©o se gĂąte de plus en plus et c’est sous de fines gouttes de pluie qu’on partira en quĂȘte de Titus Canyon. Manque de chance nous n’arriverons pas du bon cĂŽtĂ©, car une voie a sens unique vous permet de le traverser en voiture. Qu’importe, on s’extirpe malgrĂ© tout de la voiture pour aller faire quelques pas dedans, mĂȘme s’il doit ĂȘtre bien plus impressionnant en voiture qu’Ă pied. L’occasion au retour pour Manu d’Ă©changer quelques mots avec ce couple d’italiens (si j’ai bonne mĂ©moire), heureux propriĂ©taires de ce chouette van qui a fait mon bonheur photographique !
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Salt Creek !
Qu’il vente et qu’il pleuve par intermittence, qu’importe, on n’en dĂ©mords pas Ă s’aventurer Ă la dĂ©couverte de la Death Valley. Salt Creek restera partagĂ© entre le souvenir enfantin de marcher sur ce ponton de bois surplombant ce mince cours d’eau ou s’agglutinent par-ci par-lĂ des dizaines et dizaines de petits pupfish, pour le plus grand bonheur de Manu; et le souvenir de cette course folle avec Manu pour refaire le circuit qu’on venait de faire, suite Ă cette peur bleue de rĂ©aliser en arrivant Ă la voiture qu’il me manquait une pellicule…Une erreur d’inattention en changeant de pellicule, assise sur ce banc Ă moitiĂ© de parcours, et ne pas remarquer que celle exposĂ©e, rangĂ©e dans sa boĂźte avait glissé entre mes jambes sous le banc. Tous les sentiments y passent en remarquant son absence dans mon sac, je revois une Ă une chaque photo prise sur cette pellicule et ne peux croire Ă leur perte. L’essoufflement en revenant Ă ce fameux banc est balayĂ© en une fraction de seconde par le soulagement de retrouver ce petit Ă©tuis blanc, m’attendant sagement, sous ce banc. Si d’ordinaire en voyage je fais gaffe puissance 10 Ă annoter et ranger mes pellicules comme il faut, autant vous dire qu’aprĂšs cette Ă©pisode, ce fut x100 !!
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Badwater !
Badwater ne fut pas le premier ni ne dernier arrĂȘt, pourtant ce fut de loin l’un des plus marquants, ne serait-ce que pour l’orage qui grondait derriĂšre le versant de la Death Valley qui nous faisait face, ce ciel qui n’a cessĂ© de s’assombrir, ce vent de s’intensifier. J’avais beau avoir mes yeux rivĂ©s Ă ce ridicule panneau accrochĂ© Ă flan de roche, je ne parvenais pas Ă y croire. Comment, lorsqu’on vous enseigne Ă l’Ă©cole la gĂ©ographie, les continents, les ocĂ©ans; pouvez vous concevoir qu’Ă cette instant prĂ©cis, en regardant le paysage qui vous entoure et ce panneau vous ĂȘtes 30m sous le niveau de la mer, sans pour autant boire la tasse ou ĂȘtre noyĂ©e ?! Lorsqu’on est cartĂ©sienne et rationnelle comme je le suis, ça semble juste surrĂ©aliste !
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Artist’s drive !
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En faisant l’impasse sur Dante’s view et Zabriskie Point, faute de temps et d’accĂšs fermĂ©; on s’accorde une derniĂšre dĂ©couverte en empruntant Artist’s Drive et en se rendant notamment Ă Artist’s Palette. Le soleil n’est malheureusement pas de la partie pour raviver cette jolie palette colorĂ©e, mais nous en avons tout de mĂȘme un aperçu, et cela me rappelle quelque peu Painted Hills en Oregon.
Finalement, c’est sous une pluie soutenue que nous reprendrons pour de bon la route en direction de Las Vegas, comme si celle-ci s’Ă©tait tenue Ă distance toute la journĂ©e pour que nous puissions profiter d’arpenter la Death Valley pour notre unique journĂ©e sur place. A force de gagner en altitude pour traverser le versant et gagner le Nevada, on en viendra Ă voir le temps d’un court instant, la pluie se transformer…en neige !
Prochaine étape ? La lumineuse et décalée Las Vegas ! :)
Canon AE-1. Porta 160Â iso & Fuji Instax.
12 Comments
Matilda
24 juillet 2015 at 4 h 17 minJ’y suis allĂ©e il y a Ă peine quelques heures, et l’ambiance y est vraiment diffĂ©rente! On a atteint les 43 degrĂšs, et je ne cache pas que ces nuages gris auraient Ă©tĂ© la bienvenue..! Quant Ă Artist’s Palette, je peux assurer que le soleil ne ravive pas grand chose, j’ai trouvĂ© que le rendu des photographies Ă©tait plutĂŽt fade par rapport Ă ce que mes yeux voyaient. Mais il aurait fallu y aller au coucher du soleil pour voir de sublimes couleurs je pense.
En tout cas votre voyage semblait fantastique et les photos me font penser Ă celui que je fais en ce moment. C’est plutĂŽt amusant de retrouver en image des endroits oĂč j’Ă©tais il y a quelques jours, se dire que quelqu’un les a vu Ă un autre moment..!
Je suis tes voyages depuis un petit moment et j’adore l’ambiance de tes photos, ton coup dâĆil et tes mots. Ăa me donne toujours envie de voyager. Continue de voir tout un tas de chose et surtout n’arrĂȘte pas de le partager!
Vagabondanse
31 juillet 2015 at 0 h 47 minC’est drĂŽle ca comme histoire :) En tout cas tu ne peux pas me faire plus plaisir avec ton commentaire Matilda ! Merci beaucoup, sincĂšrement. Ce sont des petits mots pareils qui boostent dans les moments de doute et aide Ă balayer le manque de confiance en soi. J’espĂšre que tu savoures ce joli voyage que tu es en train de faire, la Californie fut un joli coup de coeur pour moi ! Je n’ose imaginer ce que ca a du ĂȘtre de vivre la Death Valley sous la chaleur Ă©crasante !!
laurent
29 avril 2015 at 12 h 11 minLes images sont magnifiques. On se croirait dans un film ! Je n’en avais pour ma part pas entendu parler, ça donne envie !
Vagabondanse
29 avril 2015 at 15 h 40 minMerci beaucoup Laurent ! C’est vrai que la Death Valley a quelque chose de mythique, avec toutes les histoires qu’elle recĂšle, on se croirait encore plus dans un film :)
Si tu as l’occasion de passer par ce coin de la Californie, alors n’hĂ©sites surtout pas !!
Mathilde
15 avril 2015 at 0 h 39 minC’Ă©tait tellement chouette cette journĂ©e ! Et le ‘mauvais’ temps Ă©tait plutĂŽt une bonne nouvelle.
PS Ă©gocentrique : j’aime ma bague.
Vagabondanse
24 avril 2015 at 2 h 54 minHahaha, mais tu peux l’aimer ta bague !! J’adore cette photo, ce genre de moment, cette gestuelle Ă photographier :) Bon pour l’anecdote, t’as pas idĂ©e le temps que je suis restĂ©e prĂȘte Ă dĂ©clencher car t’arrĂȘtais pas de bouger et de changer de “mimique” ^^
Manu
14 avril 2015 at 21 h 06 minSuper photos ! Je retrouve bien l’ambiance de ce lieu magique. Bel exploit d’avoir capture Bad Water sans aucun touriste sur la photo :)
Vagabondanse
24 avril 2015 at 2 h 53 minMerci beaucoup Manu ! Vraiment contente d’avoir su capter l’ambiance de ce lieu fou ! :) Bon je le concĂšde, ca n’a pas Ă©tĂ© si simple de prendre Badwater sans touriste !! Mais mission rĂ©ussie !
Letizia
10 avril 2015 at 13 h 05 minC’est drĂŽle comme la Death Valley change de saison en saison. J’y suis allĂ©e en aoĂ»t et les couleurs Ă©taient complĂštement diffĂ©rentes. Tes photos sont incroyables, j’adore la couleur c’est comme si je voyageais dans d’anciens albums photos.
Vagabondanse
13 avril 2015 at 2 h 22 minMerci beaucoup Letizia, c’est adorable ! :)
C’est vraiment impressionnant de voir Ă quel point la Death Valley change de visage selon les saisons et surtout d’ambiance, car lĂ , en fĂ©vrier, on Ă©tait bien loin de la chaleur Ă©touffante de l’Ă©tĂ© !!
mzelle-fraise
10 avril 2015 at 11 h 14 minLa Death Valley, c’est fou, j’ai l’impression qu’on a beau avoir vu des films et des photos, on ne comprend le relief qu’en y Ă©tant. Ăa m’avait fait ça pour l’Islande, tant que je n’y avais pas “marchĂ©” je n’arrivais pas Ă apprĂ©hender ce que j’allais voir. En tout cas, mes pellicules photos sont commandĂ©es, et je prendrai soin de les annoter comme toi ! Ăa ne me manque pas la frayeur de ne pas savoir oĂč est passĂ©e celle que je viens de shooter, qui me semble contenir des trĂ©sors !
Vagabondanse
13 avril 2015 at 2 h 24 minJe te rejoints tellement Johanna, sur cette idĂ©e qu’il y a des lieux, on a beau en avoir des images pleins la tĂȘte, on ne les comprend rĂ©ellement qu’en y mettant les pieds.
Pour l’annotation des pellicules, c’est un petit rituel auquel j’ai pris l’habitude de me plier depuis plusieurs voyages, ca me permet de m’y retrouver de savoir Ă quelle jour correspond telle pellicule, mais surtout, lorsque je shoote divers pellicules au sein d’un mĂȘme voyage, c’est comme un petit mĂ©mo :)